Pédagogie

La transposition didactique interne et externe

transposition didactique interne et externe

Yves CHEVALLARD a développé la notion de transposition didactique afin d’étudier un certain nombre de phénomènes qu’il a repérés dans l’enseignement des mathématiques. Elle comprend deux étapes : transposition didactique interne et externe. Le concepteur de la transposition didactique a défini ce concept comme un contenu de savoir ayant été désigné comme savoir à enseigner subit dès lors un ensemble de transformations adaptatives qui vont le rendre apte à prendre place parmi les objets d’enseignement. Le « travail » qui d’un objet de savoir à enseigner fait un objet d’enseignement est appelé la transposition didactique.

La transposition didactique interne et externe

Les savoirs à enseigner se distinguent des savoirs savants. Ce sont ceux « qui sont décrits précisés, dans l’ensemble des textes contenus, des normes, des méthodes ». Le passage des uns aux autres correspond à ce que Chevellard a qualifié de transposition didactique externe. (car hors du système d’enseignement et de la classe). Cette première étape de la transposition didactique se caractérise par ce que l’auteur appelle la « noosphère » (sphère où l’on pense) : ensemble des personnes qui pensent et interfèrent sur les contenus d’enseignement.

La deuxième phase de la transposition didactique se passe entre les savoirs à enseigner et les savoirs réellement enseignés. Il s’agit de la transposition didactique interne, car « elle est le fait des enseignants et de leurs pratiques ». Généralement ces deux étapes ne sont pas réalisées par les mêmes personnes. Les savoirs savants étant créés parles chercheurs et les savoirs enseignés… enseignés par les enseignants. Les fonctions des uns et des autres diffèrent.

À titre d’exemple, il ne semble pas nécessaire que les élèves apprennent que l’aspartame est un « bipeptide ». Il est par contre important que l’enseignant sache de quoi il s’agit s’il veut mettre en lien la consommation de cet additif avec l’augmentation du risque de développer un diabète de type 2 et transmettre la compréhension et la reconnaissance de ce lien.

Les avantages que cette double position et fonction nous apportent se trouvent dans la diminution du nombre d’intermédiaires entre le début et la fin de la transposition didactique, dans la garantie d’un meilleur contrôle de la matière. Et dans la capacité de distinguer les concepts clés de cette nouvelle matrice disciplinaire (ou plutôt interdisciplinaire, nous y reviendrons également). Cette position permet également de pallier au retard du « temps scolaire » sur le « temps savant » qui « ne cesse de s’accroître » selon les termes d’Alpe et Barthe. 

Ces deux auteurs nous rappellent en effet que : « l’enseignement a du mal, du fait de son caractère fortement institutionnalisé, à suivre le mouvement des connaissances. Une grande part des programmes scolaires conduit à enseigner des “choses mortes”, des connaissances dépassées ou des questionnements obsolètes. Les tensions s’accroissent entre le principe de stabilité relative des savoirs scolaires et le rythme d’évolution des savoirs. Le caractère programmable des savoirs scolaires, la nécessité de penser des cursus pluriannuels se conjuguent mal avec les nécessités d’une permanente mise à jour des savoirs. Un système d’enseignement de plus en plus complexe quant à son organisation se prête mal à une évolution rapide. Il y a donc une déconnexion croissante entre les savoirs scientifiques les plus élaborés et les savoirs véhiculés par le système scolaire.

Pratiques sociales de référence

Cependant les savoirs savants ne sont pas les seuls savoirs de référence. Il faut également compter avec les « pratiques sociales de référence ». Celles-ci désignent « l’ensemble des activités sociales (vécues, connues ou imaginées). Par ailleurs, elles vont servir de référence pour construire des savoirs à enseigner et des savoirs enseignés. Elles permettent à l’enseignant de donner du sens à ce qu’il enseigne. Associer un apprentissage donné à une pratique sociale de référence revient à se poser la question : à quoi ça sert dans la société ? ».

Dans notre cas, cet apprentissage concerne directement les choix alimentaires des élèves, l’utilité étant évidemment de leur donner les moyens de mieux maîtriser les risques inhérents aux produits alimentaires, à en évaluer la qualité, à opérer des choix conscients et à revendiquer une amélioration tant à travers leurs choix de consommateurs que de citoyens. Donc, nous sommes en concordance avec les objectifs et les finalités des « éducations à » au sujet desquelles nous reviendrons.

Conclusion

Le concept de transposition didactique est riche et donne à réfléchir sur nos pratiques professionnelles usuelles. De surcroît, il questionne les pratiques de l’enseignant ordinaire. Mais à plus forte raison encore nos pratiques — qui sont à vrai dire exacerbées d’enseignants spécialisés. Nous l’avons vu, à travers la programmation du savoir, le choix des objets d’enseignement et la temporalité didactique par exemple. Il anime également des questions essentielles au cœur de nos pratiques quotidiennes. À nos yeux, il donne aussi vie à deux concepts émergents que sont la « professionnalité accentuée » et la « didactique adaptée.

Comment faire une transposition didactique ?

Pourquoi la transposition didactique ?

Les 2 étapes de la transposition didactique

Sources :

  • Haute École Pédagogique Vaud. Lausanne, Master of Advanced Studies/Diplôme d’enseignement pour le secondaire II. Transposition didactique d’un thème interdisciplinaire en éducation au développement durable et à la santé. Septembre 2014
  • Perrenoud, P. (1998). La transposition didactique à partir de pratiques : des savoirs aux compétences. Revue des sciences de l’éducation, 24 (3), pp. 487-514
  • Frédéric DUPRE, Léa CHABANEL, MASTER MEEF PIF – PARCOURS IDP-La transposition didactique : Caractérisation, Débats et Pratiques professionnelles

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