Pédagogie

Pédagogie Freinet en élémentaire

Pédagogie Freinet au Primaire

À l’aube du XXe siècle, un vent de changement souffle sur l’éducation. Au cœur de cette révolution pédagogique, Célestin Freinet, un enseignant visionnaire, forge une approche révolutionnaire qui va transformer les salles de classe en un terrain fertile pour l’imagination et l’apprentissage autonome. Loin des rangées de pupitres et des leçons magistrales, la pédagogie Freinet invite à un voyage où chaque enfant devient l’artisan de son savoir, un voyage peuplé de découvertes, d’expériences vécues et d’échanges enrichissants. Dans cet article, nous explorons comment la pédagogie Freinet, avec ses principes d’autonomie, de coopération et de créativité, réinvente l’éducation au primaire, en faisant éclore chez chaque élève le potentiel infini de curiosité et de découverte. Plongez avec nous dans cet univers où enseigner et apprendre riment avec passion, liberté et innovation.

Pédagogie Freinet : définition

Les enseignants Freinet considèrent l’élève comme un acteur. Il n’est plus passif. Ils les poussent à acquérir de nouveaux savoirs par lui-même. Freinet n’a pas fondé sa pédagogie sur l’obéissance et la répétition, mais sur la coopération, l’entraide et l’esprit critique.

Naissance des classes promenades et du texte libre

Les instructions officielles de 1923 prônent les « classes promenades ». Pour Freinet, c’est l’occasion d’observer les intérêts de ses élèves. L’un organise une course d’escargots, un autre observe une chenille, un troisième attrape un lézard : il leur propose de rédiger des textes relatant ces expériences. C’est à partir de ce moment que le texte libre est né. Les enfants n’écrivent pas des sujets imposés par le maître, mais écrivent des textes sur des sujets de leur choix.

Intégration de l’imprimerie en classe et la création d’un livre vécu

Freinet intègre l’imprimerie dans sa classe en 1924. Chaque jour, les enfants écrivent des textes, les corrigent et choisissent ceux qui seront imprimés : « Nous avons ainsi, durant l’année 1924-1925, imprimé environ deux mille lignes […]. Nous avons donc là notre livre, non seulement copieux, mais vécu, travaillé, scruté ligne à ligne, et dont l’intérêt pour les élèves est tout simplement une révélation », écrit Freinet.

La Correspondance scolaire et les projets élève-initiés

Il commence à intégrer une astuce de sa pédagogie c’est la correspondance scolaire. Il est de plus en plus fréquent que les élèves des classes traditionnelles travaillent en projet. Eux aussi vont faire un journal, préparer le concours des écoles fleuries ou monter une pièce de théâtre, mais il s’agit d’un projet proposé, décidé par l’enseignant. Dans une classe Freinet, la motivation des élèves tient au fait qu’ils mènent des projets qu’ils ont eux-mêmes initiés. De plus, les élèves d’une classe Freinet ne mettent pas en œuvre un projet, mais plusieurs (projets collectifs — journal, correspondance, préparation d’une exposition, d’un voyage… – et projets individuels) : ce n’est pas l’exceptionnel, mais l’ordinaire.

Enfin, dans une classe Freinet, les élèves s’organisent eux-mêmes pour mener à bien leurs projets. Pour les enseignants, apprendre à s’organiser collectivement, gérer le temps, répartir les tâches, faire des choix, décider des règles de vie collective, régler les conflits sans violence… est essentiel : c’est ce qui fait de la classe Freinet une classe coopérative.

Principes de base de la pédagogie Freinet en élémentaire :

Donc, la Pédagogie Freinet au primaire se base sur les principes suivants.

1. Apprendre dans des situations ≪vraies ≫

Les classes Freinet sont fondées sur le principe selon lequel les enfants apprennent à travers des situations « vraies » (et non « scolaires ») qui donnent du sens aux savoirs. La classe travaille à partir des intérêts des enfants, de leurs interrogations, de leurs désirs, en mettant en œuvre des projets. L’enfant apprend à écrire en écrivant, non pas des rédactions, mais des articles pour le journal de la classe ou une lettre à son correspondant. Il s’entraîne à lire, non pas dans un manuel scolaire, mais enlisant le mode d’emploi du fax, la recette de cuisine qu’il veut réaliser ou les poésies envoyées par les correspondants. Il apprend les mathématiques, non pas à partir d’histoires de trains qui se croisent, mais à partir de problèmes posés par l’expérience vécue et les besoins initiés par les projets : combien vendre le journal scolaire, sachant que le photocopieur demande 15 euros pour photocopier cent exemplaires ?

2. Le dialogue du matin

Au début de chaque jour, les enfants discutent d’un sujet de leur choix. Cette pratique intègre la vie quotidienne dans la classe.

Par exemple, un enfant qui se présente à l’école, le matin, avec un nid trouvé dans un buisson.

Où l’as-tu trouvé ? – Dans un buisson, prés de chez moi. – Dans un buisson ? Les nids se trouvent seulement dans les branches des arbres ? – En trouve-t-on ailleurs que dans les arbres et les buissons, et pourquoi ?- En quoi est-il fait ? – Je ne sais pas, il faudrait le défaire pour voir. – Oh !il y a deux plumes dedans, des plumes de quel oiseau ? – Il faut chercher, ce ne sont peut-être pas les siennes…

3. Communiquer et permettre des ouvertures sur l’extérieur

Le journal et la correspondance scolaire sont pratiqués dans la majorité des classes Freinet, car ils permettent d’écrire dans des situations réelles. Chaque enfant a son (ou ses) correspondant(s) personnel(s), et la classe échange également des courriers et des colis collectifs, comprenant des réalisations de la classe, une vidéo réalisée par les élèves, des spécialités alimentaires locales…

Une classe Freinet édite également un journal scolaire. Là aussi, c’est l’occasion pour les enfants d’écrire et de réaliser des recherches.

Le choix des articles nécessite des débats, des votes, qui permettent de travailler l’expression orale et l’argumentation. À l’origine, les classes Freinet étaient équipées d’une imprimerie, aujourd’hui détrônée par l’apprentissage de la dactylographie et de la mise en page sur ordinateur. Le journal peut également être remplacé par un site Web ou un blogue, et la correspondance papier par l’échange de courriels. À la différence des classes Steiner ou Montessori, les nouvelles technologies sont très présentes dans les écoles Freinet.

Les classes peuvent aussi monter des expositions, fabriquer une vidéo, préparer un spectacle, enregistrer une chanson, concevoir des émissions de radio. Elles sortent beaucoup (visites, rencontres, échanges avec les correspondants…) : ce qui intéresse et motive les enfants, c’est d’être en communication avec les autres, avec l’extérieur, estiment les enseignants Freinet.

4. Des temps de travail individualisé

Tous les apprentissages ne peuvent pas s’effectuer par le biais de projets. La maîtrise de l’imparfait, de l’accord du verbe ou de la table

de multiplication de 9 demande un entraînement spécifique. Dans ce domaine, chaque enfant a des acquis et des besoins différents. C’est pourquoi, comme dans une classe Montessori, une partie de la journée est consacrée au travail individualisé.

Personnalisation de l’apprentissage et valorisation de l’expression individuelle

Dans certaines classes, les élèves passent aussi en début d’année des tests de français ou de mathématiques qui permettent de connaître leur niveau. À partir de ces données, l’enseignant aide chaque élève à construire son plan de travail personnel qui comporte un certain nombre de tâches à réaliser en autonomie pendant un temps donné (deux jours, une semaine, quinze jours…).

Le temps de travail individualisé est aussi consacré à la réalisation par chaque élève de ses projets personnels. C’est souvent l’entretien du matin qui aura suscite le désir de faire un expose sur l’Espagne ou le souhait de construire un circuit électrique… Les réalisations sont ensuite présentées à la classe, ce qui peut susciter chez d’autres l’envie d’en savoir plus sur tel sujet ou de réaliser une autre expérience.

L’expression individuelle a une grande importance. Chaque semaine, l’élève d’une classe Freinet doit produire un ou plusieurs textes libres et une ou plusieurs réalisations artistiques de son choix (peintures, sculptures…).

Lorsqu’un élève maîtrise une compétence, il passe un test de connaissances qui valide ses acquis et lui permet d’obtenir un brevet. Les élèves possèdent la liste de tous les brevets qu’ils doivent passer en un cycle 51. Par exemple, à l’école primaire, il faut en grammaire, valider le brevet ≪reconnaître le verbe dans la phrase ≫ ou ≪reconnaître et utiliser le passé simple≫. Il n’y a pas de note. Chaque élève apprend à son propre rythme, et chacun doit être encouragé.

5. Une classe atelier

La classe est organisée comme un atelier ou un laboratoire. Les tables ne sont pas alignées face au tableau, mais disposées pour permettre le travail en groupe. Des étagères accueillent les fichiers auto correctifs, des ouvrages documentaires, la collection des Bibliothèques de travail, des dictionnaires, du matériel permettant de réaliser des expériences scientifiques(fils, ampoules et piles pour des montages électriques, balance, poids, bouchons en liège, bassine pour mettre de Peau, bouteilles vides…)et/ou des travaux manuels (cartons, colle, marteau, clous…). On peut aussi trouver un fax, un hamster, des cochons d’Inde ou des poissons, des graines, un appareil photo numérique, un scanneur… Les murs sont généralement entièrement couverts par les productions des élèves (poèmes, peintures, courrier des correspondants…) et par des affiches relatives à l’organisation de la classe (liste des règles de vie, des exposés en cours, des compétences de chacun pour favoriser l’entraide, de l’emploi du temps, des responsabilités…).

Technologie, autonomie et coopération : Les piliers de l’apprentissage en classe Freinet

On trouve toujours plusieurs ordinateurs (même si certains sont un peu anciens, faute de crédits), très utilisés : les enfants font des recherches documentaires sur Internet, envoient des courriels…

Les élèves des classes Freinet disposent d’une autonomie très importante. Ils se déplacent, peuvent se rendre aux toilettes, aller boire pendant les heures de cours ou chercher un livre à la bibliothèque.

L’entraide entre élèves est valorisée. Pour les enseignants Freinet, apprendre à travailler en groupe est essentiel. Les élèves réalisent de nombreux projets collectifs qui les obligent à coopérer pour réussir. Pendant le temps de travail individuel, il est fréquent qu’un enseignant dise à un élève venu le solliciter : ≪tiens, demande a Alexandre de t’aider, il sait faire les divisions à virgule.≫ quand la liste des élèves titulaires de chaque brevet est affichée : chaque élève sait a quel autre élève il peut demander de l’aide sur tel ou tel point. Certaines écoles organisent des marches d’échanges de savoirs, sur le modèle des Réseaux d’échanges de savoirs. Lorsque cela est possible, les classes regroupent des élèves de plusieurs niveaux pour favoriser l’entraide et la coopération.

6. La réunion de coopérative

Une fois par semaine, les élèves et l’enseignant se réunissent pour une réunion de coopérative. L’ordre du jour se compose de toutes les questions que les enfants ou l’enseignant ont posées via la boîte à lettres ou un panneau d’affichage réservé à cet usage. Un élève est le président :il donne la parole, reformule les différentes idées et s’assure que tout le monde a la possibilité de s’exprimer. Un autre élève se charge de présenter les tâches de chaque jour, et de prendre des notes du conseil.

Le conseil permet d’abord d’organiser coopérativement les projets collectifs. La classe décide de ses projets. Elle s’organise pour le travail en cours : « Le journal doit sortir dans une semaine. Il faut prévoir l’agrafage vendredi matin. Qui s’en occupera ? Ça veut dire qu’on doit finir les articles pour mardi au plus tard.

Le conseil traite aussi du respect des règles de vie. Pour Freinet, la question de la discipline passe d’abord par l’organisation de la classe :

≪l’enfant qui participe à une activité qui le passionne se discipline lui-même[…]. Le seul critère sera alors […] : travaillent-ils avec enthousiasme et entrain ?≫ explique Élise Freinet.

L’enseignant peut fonder les règles de classe avec ses élèves au début d’année : comment travailler en groupe ? Et comment traiter mes amis ? Les enfants décident eux mêmes les autres règles au fur et à mesure que des problèmes se posent et peuvent constamment être remaniées. Par exemple, les enfants peuvent monter seuls en classe des leurs arrivée le matin et y rester pendant la récréation, même en son absence. Ils posent leurs affaires, nourrissent les poissons, utilisent l’ordinateur…

Autonomie et responsabilité : Le cœur de la classe coopérative

Si deux élèves se sont violemment battus. L’école peut prendre une décision pour fermer la classe à tous en dehors des heures régulières. Deux semaines plus tard, un élève met de nouveau le sujet à l’ordre du jour :≪j’aimerais qu’on puisse rester en classe pendant la récréation.≫ Les enfants votent alors la réouverture de la classe et la nomination d’un animateur qui la surveillera pendant la recréation.

Les élèves peuvent décider de l’instauration de sanctions, généralement une réparation (excuses, réparation d’un objet dégradé…) ou la perte de certains droits. Ainsi, les enfants ≪ en autonomie≫ (la majorité du groupe) peuvent se déplacer seuls dans les locaux, chercher un document, faire une photocopie… et organisent eux-mêmes leur travail individuel. En revanche, ceux qui ne respectent pas toutes les règles ont moins de droits. Ils ne peuvent pas se déplacer hors de la classe et suivent un plan de travail détaillé qui leur laisse moins de liberté. Chaque semaine, le conseil peut modifier le niveau d’autonomie accordé à chaque enfant en fonction de son comportement.

Ce n’est pas non plus une pédagogie non directive, bien au contraire : une classe coopérative, où chacun mène simultanément des travaux très divers, a besoin de beaucoup plus d’ordre et de discipline qu’une classe traditionnelle.

Enfin, les pédagogues Freinet sont attentifs à ne pas travailler uniquement sur des savoirs utilitaires. Certes, on apprend à lire une recette de cuisine ou un mode d’emploi, mais le travail de la classe prend aussi appui sur les questions profondes que se posent les élèves (et qu’on les ignore souvent dans les classes standards) : ≪qu’est-ce que l’amitié ?≫, la vieillesse ?≫, l’infini, c’est quoi ?≫…

Pédagogie Freinet : exemple

Voici une organisation de la classe Freinet au primaire :

Les enfants entrent en classe au fur et à mesure de leur arrivée.

Certains font leurs ≪ métiers ≫, d’autres dessinent ou feuillettent un livre de la bibliothèque. La journée commence par l’entretien du matin : un élève donne la parole, un autre prend des notes pour retranscrire le contenu de la séance dans le cahier de vie de la classe. Le lundi matin, la classe organise la planification de la semaine en fonction des projets collectifs et des décisions prises au conseil : l’emploi du temps n’est qu’un repère global et qu’on peut le modifier.

Activités variées et participation communautaire

Le travail personnalisé occupe le début de la matinée. Les élèves travaillent sur des fichiers auto correctifs, font des recherches documentaires, préparent des exposés ou des articles pour le journal. Le reste de la matinée se consacre au français ou aux mathématiques. Il s’agit souvent d’un travail collectif ou en groupes à partir des productions des enfants, des recherches personnelles et collectives, ou en lien avec les projets de la classe : écriture d’une lettre collective aux correspondants, calcul des bénéfices de la vente du journal…

L’après-midi commence par un temps calme, silencieux, de vingt à trente minutes, pendant lequel chaque élève lit un livre de son choix, choisi dans la bibliothèque de la classe ou apporte de chez lui. À la fin du trimestre, chacun réalisera une affiche présentant un ouvrage de son choix pour donner aux autres le goût de s’y plonger. On peut réserver cette plage de temps à l’écriture de textes libres ou de lettres aux correspondants.

Il y a ensuite, selon les jours, Anglais, éducation physique et sportive ou arts plastiques. Avant la recréation, un temps collectif permet aux élèves de présenter leur travail à la classe : une réalisation artistique, un texte libre, une peinture, un exposé… Et une fois par semaine, c’est le conseil de coopérative.

Le samedi matin, entre 11 heures et midi, les enfants présentent leurs productions aux parents : des textes, des poèmes, du théâtre ou de la danse, des recherches. C’est I’≪ Heure des parents ≫ le samedi suivant, en alternance, se tient “Super, c’est samedi !”. Les enfants des cinq classes se rassemblent pour les présentations des meilleures réalisations de l’école.

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